Copilot+ PC : l’accessibilité comme démonstrateur sérieux de l’IA embarquée
Depuis plusieurs années, Microsoft promet une révolution de l’expérience utilisateur grâce à l’intelligence artificielle. Avec les Copilot+ PC sous Windows 11, l’éditeur franchit une étape supplémentaire en déplaçant une partie de cette intelligence directement sur la machine. Ces nouveaux PC, équipés de NPU capables de dépasser les 40 TOPS, ne se contentent plus d’accélérer quelques filtres vidéo : ils redéfinissent l’architecture fonctionnelle du poste de travail Windows.
Jusqu’ici, les annonces autour de Recall, Paint Cocreator, Live Captions ou encore Automatic Super Resolution ont surtout illustré la puissance brute de ces nouveaux composants. Intéressant, certes, mais encore très orienté démonstration technologique. L’annonce faite par l’équipe Microsoft Office Accessibility marque un tournant plus pragmatique : l’IA embarquée commence à résoudre un vrai problème métier, à grande échelle.
L’alt text : une obligation souvent négligée mais obligatoire pour la conformité RGAA en France…
Dans l’univers de Word et PowerPoint, le texte alternatif des images n’est pas un luxe. C’est une exigence réglementaire et fonctionnelle pour l’accessibilité numérique. Il permet aux personnes malvoyantes ou non-voyantes, via un lecteur d’écran, de comprendre le contenu visuel d’un document.
Dans la réalité des organisations, cette exigence est largement ignorée. Par manque de temps, de sensibilisation ou tout simplement par oubli, les images sont insérées sans description. Les équipes conformité et accessibilité passent ensuite derrière, souvent trop tard, pour corriger manuellement des documents déjà diffusés.
Microsoft s’attaque ici à ce point de friction précis : faire en sorte que l’accessibilité devienne la norme par défaut, et non une contrainte ajoutée a posteriori.
Une génération d’alt text locale, contextuelle et automatique
Sur un Copilot+ PC, Word et PowerPoint sont désormais capables de générer automatiquement un texte alternatif riche dès l’insertion d’une image. L’utilisateur voit apparaître une suggestion d’alt text qu’il peut soit approuver, soit éditer. Le même mécanisme s’applique aux images déjà présentes dans un document, via le menu “Format de l’image” ou l’outil de vérification de l’accessibilité.
Techniquement, l’intérêt est majeur : la génération est entièrement réalisée en local, grâce aux modèles d’IA embarqués et accélérés par le NPU. Aucune dépendance au cloud, aucune latence réseau, et surtout aucune fuite potentielle de données. Pour les DSI, c’est un point clé : le contenu des documents ne quitte pas le poste utilisateur.
Le résultat est également plus pertinent que les générations génériques que l’on connaissait jusqu’ici. Le texte est descriptif, contextualisé et exploitable, là où les anciennes tentatives automatiques se limitaient souvent à des descriptions vagues et peu utiles.
Un signal fort pour les DSI
Cette fonctionnalité peut sembler mineure face aux grandes annonces autour de Copilot. En réalité, elle est stratégiquement très révélatrice. Microsoft démontre que le NPU n’est pas un gadget marketing, mais un composant structurant de la plateforme Windows à venir.
Cela pose plusieurs questions concrètes :
- Faut-il commencer à intégrer la présence d’un NPU comme critère standard dans les futurs renouvellements de parc ?
- Comment valoriser ces traitements IA locaux dans une politique de sécurité et de conformité ?
- Jusqu’où Microsoft va-t-il déplacer des usages historiquement cloud vers l’edge utilisateur ?
L’accessibilité devient ici un cas d’usage “acceptable” pour introduire l’IA on-device dans l’entreprise, sans débat éthique excessif ni résistance métier.
Une disponibilité encore ciblée, mais révélatrice
La fonctionnalité est pour l’instant réservée à Word et PowerPoint sur Windows 11, version 2512 (build 19530.20006 ou ultérieure), avec un abonnement Microsoft 365 et, évidemment, un Copilot+ PC. Autrement dit, le périmètre reste restreint, mais le message est clair : certaines innovations seront désormais matériellement conditionnées.
C’est probablement là le changement le plus structurant. L’époque où Windows offrait la même expérience sur toutes les configurations touche à sa fin. L’IA embarquée introduit une différenciation matérielle assumée, que les DSI devront intégrer dans leurs feuilles de route.
Conclusion : une petite fonctionnalité, un grand signal
La génération automatique d’alt text ne fera pas la une des conférences IT. Pourtant, elle coche toutes les cases d’une innovation réussie : utile, mesurable, conforme, et techniquement bien pensée. Microsoft montre qu’il est possible de faire de l’IA autrement que par de grands discours, en améliorant concrètement la qualité des outils bureautiques.
Et, ironie de l’histoire, c’est peut-être par l’accessibilité que l’IA embarquée s’imposera durablement dans l’entreprise.