Cobalt 200 : Microsoft affine son CPU ARM pour Azure… et zappe Maia 200
En pleine effervescence autour des architectures ARM dans le cloud, Microsoft enfonce le clou. Un an après la présentation de son premier processeur ARM conçu en interne, le Cobalt 100, l’éditeur de Redmond profite d’Ignite 2025 pour lever le voile sur son successeur : le Cobalt 200. Et si la performance est clairement au rendez-vous, un silence notable entoure les efforts de Microsoft côté IA, notamment autour de Maia 200, dont l’absence a de quoi intriguer.
Cobalt 200 : une montée en gamme ARM dans l’ADN Azure
Le Cobalt 200 marque une évolution significative dans la stratégie de Microsoft visant à internaliser une partie critique de sa stack technologique. Cette deuxième génération repose sur une architecture ARM de dernière génération, gravée en 3 nm par TSMC – soit le nec plus ultra actuel, réservé à quelques très grands acteurs capables de justifier de tels volumes.
Par rapport au Cobalt 100, basé sur l’architecture Arm Neoverse N2 (64 bits, 3.4 GHz), Microsoft promet 50 % de performance supplémentaire grâce à :
- Un nombre de cœurs accru
- Des caches plus larges
- Une mémoire plus rapide
- Une efficacité énergétique supérieure, positionnant le Cobalt 200 comme la plateforme de calcul la plus efficiente d’Azure
Sur le plan de l’intégration, Cobalt 200 bénéficie d’un couplage natif avec Azure Boost (le plan de contrôle accéléré par matériel) et Azure-integrated HSM (Hardware Security Module), accentuant une tendance lourde : la fusion entre hardware custom, orchestration logicielle maison et exigences de sécurité renforcées.
Une stratégie systémique et souveraine
Microsoft suit ici une logique similaire à celle d’AWS avec ses puces Graviton : en reprenant la main sur son infrastructure processeur, l’objectif est triple :
- Réduire la dépendance à Intel et AMD pour les workloads généraux
- Optimiser le TCO des VM Azure via une plateforme maîtrisée de bout en bout
- Adapter le design CPU aux besoins spécifiques des services cloud maison
La manœuvre s’inscrit dans une approche de « silicon back vertical integration », où le matériel devient un levier stratégique de différenciation, et non plus une commodité. En revendiquant jusqu’à 50 % de gain en ratio prix/performance, Microsoft confirme que le CPU ARM n’est plus un pari mais une réalité industrielle viable pour le cloud.
Maia 200 : la grande absente
Mais ce keynote brillant côté CPU s’accompagne d’un silence assourdissant côté GPU/AI accelerators. Rien, ou presque, sur Maia 200, la prochaine version du processeur d’IA censé succéder à Maia 100. Et pourtant, ce dernier avait fait grand bruit lors de son annonce : un accélérateur conçu pour concurrencer les NVIDIA H100 sur les workloads IA de grande échelle (LLMs, modèles génératifs, etc.).
Selon The Information, la situation serait plus complexe qu’annoncée :
- Retards de production
- Problèmes de design liés aux demandes d’OpenAI
- Tensions internes sur les ressources humaines et les priorités produit
Bref, le projet Maia 200 serait repoussé d’au moins six mois, et Microsoft aurait choisi de garder le silence, peut-être pour éviter de donner du grain à moudre à ses concurrents. Ce manque de transparence tranche avec la communication volontariste autour de Cobalt, et suggère que la roadmap AI custom de Microsoft pourrait être en train de patiner.
Une division des efforts technologiques ?
Ce contraste met en lumière une réalité structurelle : la diversification technologique est complexe. Si Microsoft semble avoir trouvé son rythme sur les workloads généralistes avec ARM (Cobalt), son pari sur le silicon AI (Maia) reste semé d’embûches.
Derrière cette dualité se cache une tension stratégique :
- Côté CPU (Cobalt) : objectifs d’efficacité, de souveraineté, de rationalisation des coûts
- Côté AI (Maia) : course à l’innovation, dépendance aux partenaires (OpenAI), et pression du marché
On peut y voir une forme de répartition des risques dans une approche « best effort », mais aussi les limites de l’intégration verticale quand les partenaires stratégiques — comme OpenAI — imposent leurs priorités.
En conclusion : un Cobalt qui brille, une Maia qui se fait attendre
Avec Cobalt 200, Microsoft confirme sa capacité à rivaliser techniquement avec les géants du cloud sur le terrain des CPU ARM custom. Le saut générationnel est tangible, la plateforme est mature, et les promesses sont réalistes. Mais côté IA, la brume persiste. L’absence de nouvelles autour de Maia 200 trahit des tensions internes et des défis de mise à l’échelle.
Reste à voir si Microsoft saura trouver un second souffle côté accélérateurs, ou s’il devra composer encore longtemps avec NVIDIA… et ses marges.