Copilot et la paranoïa des DSI : quatre couches de protection… ou de complexité ?
Microsoft aime les grands écarts : après avoir injecté l’IA dans presque tout son catalogue, Redmond tente maintenant de rassurer les DSI. Le fameux Microsoft 365 Copilot, facturé 30 € par utilisateur et par mois, continue de susciter à la fois curiosité et inquiétude. Oui, l’outil s’intègre profondément dans l’écosystème Microsoft 365, mais c’est aussi une extension… payante, dépendante de licences déjà bien fournies.
À 30 €/utilisateur/mois, le ticket d’entrée reste élevé, même pour les grandes organisations. Microsoft justifie ce tarif par l’intégration native du Copilot dans les outils familiers : Teams, Word, Outlook, Excel ou encore SharePoint. L’assistant promet d’interpréter vos données internes, d’en extraire le sens, de résumer les documents et même de suggérer des plans d’action.
Mais pour beaucoup de DSI, la question n’est pas seulement « Que peut faire Copilot ? » — c’est « Que fait Copilot de mes données ? ». Des questions auxquelles nous tenterons de répondre lors du prochain Briefing Calipia en distinguant aussi ce que l’on peut faire avec la version intégrée aux abonnements E3 et E5 (Copilot Chat) déjà bien utile et intéressante d’un point de vue intégration dans la suite bureautique depuis les dernières annonces.
Le web, terrain glissant pour les administrateurs
L’un des aspects les plus sensibles reste la recherche web. Microsoft défend sa nécessité : sans accès à l’actualité ou aux données en ligne, Copilot risquerait de produire des réponses obsolètes. Cependant, l’idée qu’une IA connectée au cœur du SI puisse interroger Bing en arrière-plan peu faire frémir les responsables de la conformité.
Redmond répond avec une promesse de « couches de protection ». Quatre, pour être précis :
- Contrôle administratif fin – L’IT définit quand et comment la recherche web est autorisée, avec un suivi complet dans Microsoft Purview eDiscovery et Data Security Posture Management.
- Choix utilisateur – Chacun peut désactiver la recherche web et limiter Copilot à son périmètre interne.
- Filtrage automatique – L’IA rejette les requêtes jugées sensibles avant qu’elles ne sortent de l’environnement Microsoft 365.
- Isolement contractuel – Les données issues des requêtes Bing ne servent ni à l’entraînement des modèles, ni à la publicité, ni à la personnalisation.
Autrement dit, Microsoft fait tout pour démontrer qu’aucune information métier ne s’échappera du périmètre contrôlé. Mais dans les faits, cette architecture reste un équilibre précaire entre confort d’usage et paranoïa légitime.
Transparence et gouvernance : la ligne de crête
Microsoft insiste : tout est traçable, auditable et configurable. Les journaux d’activités, les règles DLP (Data Loss Prevention), les politiques de sécurité… tout est prêt pour que les DSI dorment tranquilles.
Mais, comme souvent, la technologie seule ne suffit pas. Le succès de Copilot dépendra surtout de la maturité des équipes : formation à la transparence, définition claire des cas d’usage autorisés, documentation des exceptions et gestion proactive des risques de fuite.
Bref, Copilot n’est pas (encore) le pilote automatique du système d’information. C’est un copilote exigeant, qu’il faut apprendre à connaître, encadrer et surveiller.
Quand Redmond brouille les frontières
Dernier coup d’éclat : Microsoft encourage désormais l’usage des licences personnelles de Copilot dans les environnements professionnels ! Une initiative qui rend (à juste titre) fous les administrateurs : comment gérer la conformité si les utilisateurs contournent les licences d’entreprise ?
Cette confusion entre usage personnel et professionnel illustre bien la stratégie actuelle de Microsoft : pousser à l’adoption, quitte à complexifier la gouvernance. Pour les DSI, le message est clair : Copilot est un outil puissant… mais à manier avec une rigueur quasi militaire.
Un copilote, pas un pilote automatique
Avec Copilot, Microsoft ambitionne de rendre l’IA aussi indispensable que Word ou Excel. Le pari est audacieux : simplifier sans compromettre la sécurité.
Mais derrière le vernis technologique, les administrateurs devront rester vigilants : transparence, contrôle et audit resteront les vrais leviers de confiance.
En somme, Copilot peut être un allié précieux pour les organisations matures — mais pour les autres, mieux vaut garder les mains sur le volant.