Microsoft et OpenAI : un communiqué de trois lignes pour masquer un océan d’incertitudes

La semaine dernière aura été marquée par un ballet inhabituel de communiqués de presse dans le monde du cloud et de l’intelligence artificielle. Alors qu’Oracle occupait le devant de la scène avec un accord monumental pour fournir ses infrastructures à OpenAI, Microsoft et son partenaire historique ont choisi d’intervenir… par un communiqué de trois phrases, dénué de détails concrets. Quand deux entreprises qui pèsent ensemble plus de 4 500 milliards de dollars publient un tel exercice de style, difficile de croire au hasard.

Le message officiel annonçait seulement la signature d’un « protocole d’accord non contraignant sur la prochaine phase du partenariat » et précisait que les négociations contractuelles étaient toujours en cours. Autrement dit : rien n’est finalisé. Pourquoi alors prendre la parole à ce moment précis ?

Le contexte : une relation sous tension

Microsoft et OpenAI négocient depuis plus d’un an la transformation de la structure capitalistique d’OpenAI, avec l’objectif affiché d’ouvrir la voie à une entrée en bourse. Microsoft détient un droit de regard considérable sur ces évolutions, mais les discussions stagnent, notamment sur la répartition du contrôle et des bénéfices. Malgré ces tensions, les deux entreprises ont tout intérêt à trouver un compromis : l’une pour sécuriser ses dépenses colossales en cloud, l’autre pour rester l’alliée privilégiée de la startup qui a remis l’IA générative au centre du jeu.

Oracle s’invite dans la partie

Mais l’urgence de ce communiqué vient surtout de l’annonce surprise d’Oracle : un contrat estimé à 300 milliards de dollars pour fournir ses serveurs à OpenAI jusqu’au début de la prochaine décennie. Résultat immédiat : +35 % sur l’action Oracle en une seule journée, même si le soufflé est légèrement retombé ensuite.

Comparons : OpenAI prévoit de dépenser 135 milliards de dollars sur les serveurs Microsoft d’ici 2030. Oracle devrait, à terme, engranger bien plus. Pour Microsoft, qui a largement capitalisé sur l’image de fournisseur exclusif d’OpenAI, ce basculement est un signal d’alerte pour les investisseurs.

Une communication défensive

Le communiqué commun apparaît donc comme un message subliminal aux marchés : « Ne vous inquiétez pas, l’alliance tient toujours ». Problème : en l’absence de faits tangibles, l’annonce ressemble davantage à une manœuvre défensive qu’à une stratégie offensive. Et la situation ne s’améliore pas avec les révélations selon lesquelles Microsoft envisagerait d’intégrer des modèles Anthropic à ses produits Copilot, estimant que la technologie OpenAI n’est pas toujours à la hauteur.

OpenAI, entre restructuration et financement

Du côté d’OpenAI, la communication répond aussi à d’autres objectifs. L’entreprise est engagée dans une discussion serrée avec le procureur général de Californie sur son plan de restructuration. Des groupes de pression plaident pour que la fondation initiale – le bras non lucratif – conserve au moins 100 milliards de dollars de participation dans la branche commerciale après transformation. OpenAI a publié simultanément un billet de blog pour confirmer qu’elle soutenait cette estimation, une information glissée dans un communiqué autrement sibyllin.

Enfin, il ne faut pas oublier la donnée financière brute : OpenAI prévoit un « cash burn » de 115 milliards de dollars d’ici 2029. Chaque annonce publique participe donc à rassurer investisseurs et créanciers potentiels : oui, les discussions avancent, et oui, des partenaires solides sont alignés.

Conclusion

En résumé, ce communiqué minimaliste illustre la fragilité d’un partenariat en pleine recomposition, où les enjeux financiers dépassent l’entendement. Microsoft doit prouver qu’il reste le fournisseur stratégique d’OpenAI malgré l’intrusion d’Oracle, tandis qu’OpenAI joue sur plusieurs fronts : restructuration, négociation politique, et levées de fonds massives.

Un rappel que dans l’univers du cloud et de l’IA, trois phrases peuvent cacher des milliards… et une bonne dose de nervosité.

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