La fin du Double Irish ?

Le Double Irish est la stratégie mise en oeuvre par un certain nombre de sociétés multinationales pour échapper à la taxation de leurs bénéfices en s’appuyant sur des particularités fiscales de l’Irlande (soyons juste, pas seulement l’Irlande, les Pays Bas sont aussi, entre autres,Capture d'écran 2014-10-15 07.52.16 partie prenante dans bon nombre de montages de cette nature). Une stratégie légale donc, mais qui n’en est pas moins moralement très critiquable (voir les différents billets publiés sur le blog Calipia : ici, ou encore ici).  Le Double Irish permet à une société A ayant des activités en Irlande de faire des paiements de redevances pour la propriété intellectuelle à une autre filiale B irlandaise, enregistrée séparément (généralement uns structure minuscule). Cette filiale, bien que constituée en Irlande, a généralement son domicile dans un pays qui n’a pas d’impôt sur les sociétés (ex les Bermudes, certains états américains ou le Luxembourg). Au finale la société A ne paie pas beaucoup d’impôts, car comme par hasard une grosse part de son flux financier part en royalties, et la société B est très peu taxée grâce à son paradis fiscal.

Cette mécanique explique en partie l’attrait de l’Irlande (en plus de ses paysages magnifiques, voir la photo ci contre) auprès d’un grand nombre de sociétés internationales ! Après de nombreuses années de laissez-faire, l’Union Européenne, seul acteur capable de faire bouger les choses, semble enfin avoir décidé de mettre la pression sur l’Irlande.

Ainsi hier, le premier ministre irlandais, Michael Noonan, a annoncé devant le parlement du pays son engagement à supprimer de la législation fiscale du pays les éléments qui permettent le Double Irish. Ce que souhaite monsieur Noonan c’est supprimer la mécanique décrite ci dessus et taxer les entreprises qui opèrent en Irlande sur la base du CA réellement généré dans le pays, sans prise en compte des royalties éventuellement versés à d’autres structures.

C’est donc un premier pas. Qui ne sera certainement pas suffisant pour en terminer avec les problèmes de fuite de recettes fiscales pour les autres pays européens concernés (la France au premier chef). En effet, l’Irlande n’annonce pas de changement de taux d’imposition pour les entreprises. Il restera donc toujours plus attractif d’aller payer ses impôts en Irlande plutôt qu’en France. Les filiales françaises de Google, Amazon, Microsoft, Apple … resteront donc encore pour un moment des coquilles fiscalement « vides » qui ne dégagent quasiment aucun profit, puisque tous les contrats opérationnelles de vente sont réalisées par leurs structures soeurs en Irlande.

Par ailleurs, il semble que ces mêmes sociétés multinationales développent des stratégies d’évitement fiscal qui reposent sur d’autres mécanismes que celui du Double Irish. La Commission Européenne s’intéresse beaucoup en ce moment au cas d’Apple en Irlande ou de Fiat au Luxembourg (autre joli pays pour les amateurs du concept « 0 impôt »), et ce n’est pas le Double Irish qui semble mis en oeuvre dans ces cas là. L’imagination des responsables de ces multinationales semblent sans limite pour trouver une parade à l’impôt, en utilisant bien sûr des moyens légaux. D’autant que si l’Irlande modifie sa législation sur le Double Irish, tous les « bénéficiaires » actuels pourront continuer à le mettre en oeuvre jusqu’en 2020…

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