Windows 10 sur ARM : la fin programmée du « Wintel » ?

Depuis leurs créations, les sociétés Microsoft et Intel ont souvent connues des destins intimement liés. Tout a commencé dans les années 1980 au lancement de l’IBM PC où le géant du monde  informatique de l’époque avait choisi pour la conception de son ordinateur personnel, deux sociétés quasiment inconnues et qui n’étaient pas les leaders de leur secteurs d’activité : Intel pour la fourniture du processeur de la machine (Intel 8086 dont le fondeur vient de fêter le 40 ème anniversaire le 8 juin dernier) et Microsoft pour la fourniture du système d’exploitation (PC-DOS qui deviendra plus tard MS-DOS).

fortuneIBM pensait alors pouvoir facilement encadrer ces deux « petits » acteurs, en tout cas plus facilement que si elle avait choisi les leaders de l’époque : Motorola pour les processeurs 68000 équipant déjà le matériel d’Apple et Digital Research avec son système d’exploitation CP/M équipant les premiers micro ordinateurs.

L’avenir en décida autrement…

La lune de miel entre Microsoft et  Intel s’est poursuivie et amplifiée avec l’arrivée de Windows, les deux acteurs, en position dominante sur leur marchés respectifs, étaient alors souvent accusés à raison, de s’entendre sur leurs stratégies respectives.

Les versions du produit phare de Microsoft,  Windows, disposaient alors de versions directement liées aux versions des processeurs du fondeur : Windows 286, Windows 386, nécessitant donc les nouvelles version de processeur 80286, 80386…

C’est à cette même époque que l’appellation « Wintel » est apparue. Contraction de Windows et d’Intel et mise en exergue de ce qui apparaissait comme un monopole sur le poste de travail.

Premières infidélités

Avec Windows NT en 1993 Microsoft avait fait quelques infidélités à Intel en proposant pour Windows le support de processeurs d’autres fondeurs :  Alpha de Digital Equipment, les processeurs MIPS puis PowerPC de Motorola et d’IBM.

L’expérience n’a pas duré très longtemps devant le peu d’engouement des utilisateurs pour ces processeurs d’une part mais aussi et surtout par le manque cruel d’applications qui devaient bien entendu être spécifiquement compilées pour ces machines. Ainsi tous les éditeurs devaient non seulement créer une version pour processeur Windows NT sous Intel mais aussi pour Alpha, Mips ou PowerPC. Sans surprise ce fut la version Intel dites x86 qui fut la plus poplaire, car disposant de toutes les applications.

Même si les adaptations devaient être légères (une simple compilation avec les bonnes librairies) elle n’étaient pas ou peu réalisées car le marché adressé était beaucoup moins important. Même Microsoft n’était pas exemplaire, il a fallu attendre plusieurs années pour disposer de versions de mêmes niveaux de Microsoft Office sur tous ces processeurs… Résultat : les versions spécifiques de Windows pour processeur non Intel ne se déployaient pas par le manque d’applications supportant ces plateformes, et les développeurs ne créaient pas de versions spécifique pour ces même processeurs car il n’y avaient pas ou très peu d’utilisateurs : le serpent se mordait la queue !

Deuxième tentative

Il y a 5 ans, en octobre 2012, Microsoft tenta  une nouvelle fois de proposer son système Windows pour d’autres processeurs que ceux d’Intel (ou x86, compatibles avec ce dernier type AMD). Avec Windows 8, la version « Windows RT » fut lancée, elle proposait un fonctionnement sur plateforme ARM de Windows.

windowsRTLe succès se fit attendre pour les mêmes raisons : un catalogue applicatif extrêmement pauvre pour ne pas dire quasiment vide sur certaines catégories d’applications. En paralèlle, la promesse de Microsoft était de développer des applications pour PC ou tablette qui fonctionneraient également sur les Smartphones Windows Phone. Devant l’échec de Windows Phone (largement pour les mêmes raisons : le manque d’applications), la mayonnaise ne pris pas et le « Store Windows » resta anémique condamnant ainsi Windows RT qui n’était pas capable d’exécuter d’autres applications que celles présentes sur le magasin maison de Microsoft.

La troisième tentative sera-t-elle la bonne ?

La troisième tentative a été annoncée il y a 3 semaines lors du salon Computex 2017. Microsoft va proposer avec Windows 10 Fall Creators Update (prochaine version de Windows 10 prévue pour l’automne 2017) le support d’ARM en partenariat avec Qualcomm  pour la conception de PC sous Windows 10 ARM virtuellement toujours connectés, à la manière des smartphones.

slide1Ce système  serait capable d’exécuter les applications compilées normalement pour x86 au travers d’un système d’émulation maison offrant la possibilité d’exécuter toute la logithèque x86 établie pour les versions classiques de Windows.

Windows 10 ARM s’appuirait actuellement sur une seule  solution ARM: le SoC Qualcomm Snapdragon 835 combinant puissance (le plus puissant des processeur ARM d’aujourd’hui)  tout en étant très sobre en dépense énergétique.  Qualcomm, communique ainsi sur une autonomie 50% plus élevée que celle d’un PC classique en fonctionnement et une durée de veille quatre à cinq fois supérieure.

slide2L’intégration réseau serait également largement facilitée pour les constructeurs car les cartes de référence du processeur  Snapdragon 835 intègrent les différents contrôleurs réseau cellulaire (4G), Wifi ( 802.11ac et ad), Bluetooth (5.0) et un GPS. Elles intègrent également un controleur graphique capable de décoder des flux vidéos 4K. Le tout à des prix beaucoup moins élevés que leurs équivalents sous plateforme Intel…

Les constructeurs HP et Lenovo qui travaillent déjà avec Qualcomm ont déjà annoncé le support de cette solution. D’autres devraient suivre tels que : Dell, Asus, Xiaomi ou encore Huawei. Encore une différence avec Windows RT où à l’époque seul Microsoft s’était réellement engagé avec sa Surface RT.

La riposte d’Intel ?

La riposte d’Intel à cette annonce ne s’est pas fait attendre. Au travers d’un article publié jeudi 8 juin sur son blog, le fondeur a laissé entendre que Microsoft et Qualcomm pourraient enfreindre ses brevets avec Windows sur l’émulation x86 …

« Intel protège soigneusement ses innovations x86, et nous n’autorisons pas d’autres sociétés à les utiliser. Au cours des 30 dernières années, Intel a appliqué rigoureusement ses droits en matière de propriété intellectuelle contre les infractions commises par des microprocesseurs tiers. L’un des premiers exemples a été l’application par Intel du brevet « Crawford 338 ». Tout au long de son activité Intel à fait respecter ses droits et ses brevets contre de nombreuses sociétés dont United Microelectronics Corporation, Advanced Micro Devices, Cyrix Corporation, Chips and Technologies, Via Technologies et, plus récemment, Transmeta Corporation. Les actions judiciaires n’ont pas été nécessaires ces dernières années parce que d’autres entreprises ont respecté les droits de propriété intellectuelle d’Intel. Cependant, nous avons des informations selon lesquelles certaines entreprises pourraient essayer d’imiter l’ISA X86 propriété d’Intel sans notre autorisation… »

Une menace à peine voilée contre ce que vient d’annoncer son grand rival Qualcomm avec Microsoft !

A la demande explicite de  Mary Jo Foley de ZDNet auprès d’Intel pour savoir si les travaux de Qualcomm et Microsoft était visés, elle a reçue la réponses suivante de Steve Rodgers (Vice Président exécutif et conseiller général d’Intel) :

« Intel respecte les droits de propriété intellectuelle et nous espérons que d’autres feront la même chose. La technologie x86 est à la fois propriétaire et centrale pour notre entreprise, et nous sommes concernés chaque fois qu’il apparaît que d’autres peuvent la copier de manière inappropriée. Nous évaluerons en profondeur tous les produits qui prétendent imiter la technologie x86 et ferons appliquer vigoureusement nos droits de propriété intellectuelle si nous croyons qu’ils sont atteints. »

A suivre dont, mais en tout cas, il est clair que le fondeur ne compte pas faire de cadeau de marié à ce nouveau couple. Tout pense à croire néanmoins que son courroux serait plutôt dirigé vers Qualcomm que vers Microsoft avec lequel il continue de collaborer étroitement. Dans sa lutte (vitale) contre les processeurs ARM, Intel n’avait pas hésité il y a plus de 5 ans, à proposer des processeurs pour Android, avec pour résultat de très nombreuses tablettes aujourd’hui qui fonctionnent sous Intel Atom et Android à la place ou parfois conjointement avec Windows.

Alors : succès ou pas ?  Difficile de faire des pronostics, tout dépend à la fois de la puissance réelle qui sera offertes par ces solutions, en particulier en matière d’émulation x86, de la taille du catalogue applicatif natif, de l’engagement des constructeurs et évidemment des prix pratiqués pour ces configurations.

 

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