2021 : La fête aux Big Tech ?

Nous en parlions ici, l’administration du Président Biden vient de s’adjoindre les services d’un conseiller spécial pour la technologie et la politique de la concurrence, conseiller connu pour ses positions anti géants de la technologie. Mais il semblerait que cette même administration soit également en train de pousser pour qu’une jeune juriste de 32 ans, Lina Khan, soit nommée à la Federal Trade Commission (FTC), service fédéral qui va jouer un rôle crucial dans les prochains mois pour définir et orchestrer la gouvernance de la nouvelle administration américaine sur les questions de protection de la concurrence et des consommateurs.
Malgré sa jeunesse, Lina Khan n’est pas une inconnue dans le domaine des lois antitrust. Elle s’est fait connaître, encore étudiante à l’université de droit de Yale, en faisant paraitre en 2017 un article intitulé Amazon’s Antitrust Paradox, qui eut un retentissement important. Elle défendait le point de vue selon lequel les pratiques de la législation anti trust américaine basées essentiellement sur les prix, c’est à dire s’assurer qu’un acteur ne soit pas en mesure d’augmenter indûment ses tarifs au seul fait qu’il contrôle un marché, n’étaient pas adaptés au contexte actuel, en particulier pour les plateformes en ligne. Pour Lina Khan, ce n’est pas seulement le contrôle des prix par un acteur qui témoigne d’un monopole, mais plus largement les dommages qu’il peut provoquer à ses clients ou ses compétiteurs pour acquérir ou conserver son monopole. Selon L.Khan, 2 éléments spécifiques au contexte des grands acteurs du numérique expliquent la nécessité de changer le point de vue :
- Le marché dans lequel évolue ces acteurs préfère la croissance aux profits, créant ainsi un contexte favorable à des pratiques de prix prédateurs pour éliminer toute forme de concurrence. Les services ainsi tarifés servent alors de prix d’appel et entrainent les consommateurs vers d’autres services, sans ou avec moins de concurrence, sur lesquels la tarification est cette fois-ci très rémunératrice.
- Les positions acquises sur le marché rendent incontournables ces grandes plateformes, même pour leurs concurrents. Il ne leur reste plus qu’à capitaliser sur la grande intégration de leurs différentes activités pour partager des informations acquises sur un client de leurs services, pour les affaiblir en tant que concurrent potentiel ou avéré sur un autre.
Si l’auteur prenait le cas d’Amazon pour illustrer son propos, elle précisait toutefois dans son article que toutes les plateformes en ligne dominantes étaient concernées. Facebook va certainement sentir la menace puisque la FTC est à la tête de l’action entamée conjointement fin 2020 avec plus de 40 états américains pour pratiques anti-concurrentielles de l’entreprise de Menlo Park. L’arrivée (non encore avérée) de Lina Khan ne vas pas simplifier le problème de Facebook…
On savait que Jeff Bezos n’était pas l’ami de D.Trump, mais est-il / restera t’il celui de J.Biden ?